La crise énergétique pèse sur l'économie

Selon les prévisions conjoncturelles du KOF, le produit intérieur brut (PIB) suisse devrait augmenter de 2,3% cette année. Pour l'année prochaine, le KOF prévoit dans son scénario de base une augmentation de 1% du PIB réel corrigé des retombées des évènements sportifs. Pour l'Europe, l'incertitude concernant l'approvisionnement en gaz a fortement augmenté en hiver. Dans son scénario de base, le KOF part néanmoins du principe qu'il n'y aura pas de rationnement formel important dans ce domaine.

Pas de récession en Suisse malgré la forte hausse des prix de l'énergie

La guerre en Ukraine a entraîné une forte hausse des prix de l'énergie dans le monde entier, une situation qui a favorisé l'inflation dans de nombreux pays. Les problèmes d'approvisionnement qui persistent et la pandémie de COVID-19 qui sévit en Chine alimentent encore cette évolution des prix. Certes, l'inflation en Suisse est plus faible en comparaison internationale, mais elle freine ici aussi l'évolution du pouvoir d'achat. Dans ces conditions, selon les prévisions du KOF, le PIB réel (corrigé des grands événements sportifs) augmentera de 2,3% cette année, de 1% l'année prochaine et de 1,7% en 2024. Dans le scénario de base du KOF, l'économie suisse peut donc éviter une récession technique avec deux variations trimestrielles négatives consécutives. Au cours de l'année 2023, la conjoncture se redressera lentement avant de se normaliser en 2024.

L'incertitude sur l'approvisionnement en gaz affecte l'économie mondiale

L'incertitude quant à l'approvisionnement en gaz pour l'hiver prochain a augmenté, en particulier pour l'Europe et l'Allemagne. Dans son scénario de base, le KOF part toutefois du principe qu'il n'y aura pas de rationnement formel important. Les livraisons en provenance d'autres pays, les économies et l'utilisation des stocks de gaz permettent, dans le cas favorable - supposé ici dans le scénario de base - d'éviter un tel rationnement formel par la politique. Néanmoins, la pénurie se manifeste par l'augmentation des prix et rend déjà certains modèles commerciaux non rentables. En plus du scénario de base, le KOF a élaboré deux scénarios plus négatifs, avec des crises énergétiques plus sévères (cf. l'encadré ci-dessous).

La consommation intérieure, pilier de la conjoncture suisse

Les effets spéciaux consécutifs à l’accalmie de la pandémie s'estompent à l'automne en ce qui concerne les dépenses de consommation privée. Les consommateurs font à nouveau preuve d'une certaine retenue. Au cours des deux prochains trimestres, la consommation privée continuera d'augmenter, notamment en raison de la demande de services. Les revenus réels sont certes sous pression, mais cette situation, au regard de l'évolution de la consommation, sera atténuée par une nouvelle baisse du taux d'épargne qui reste encore élevé. Une croissance démographique plus élevée vient s'y ajouter. Ainsi, contrairement à l'Allemagne par exemple, la consommation privée nationale sera un pilier important de la conjoncture en Suisse au cours des prochains trimestres.

Le marché du travail en hausse commence à s’essouffler

Jusqu'à la fin de l'été, l'évolution sur le marché du travail était très positive, le taux de chômage baissant à des valeurs nettement inférieures à celles de l'année 2019, avant la crise. La situation sur le marché du travail devrait toutefois changer à la fin de l'automne. Compte tenu des perspectives conjoncturelles moroses, la création d'emplois devrait diminuer durant deux trimestres. Le taux de chômage augmente légèrement au cours de l'année 2023, mais reste à un niveau historiquement bas, proche des faibles valeurs de 2019. En moyenne annuelle, il en résulte un taux de chômage selon le calcul de l'Organisation internationale du travail (OIT) de 4,2% cette année et de 4,1% l'année prochaine.

La pression sur les prix devrait diminuer à partir du milieu de l'année prochaine

Le taux d'inflation suisse est passé à 3,5% cet été, soit son niveau le plus élevé depuis près de 30 ans. Etant donné que la conjoncture internationale ralentit sensiblement, le KOF ne s'attend pas à de nouvelles hausses brutales des prix des produits pétroliers ou des métaux industriels. C'est pourquoi des taux d'inflation supérieurs à 3% seront encore observés dans les mois à venir, mais ils ne devraient pas dépasser 3,5%. A partir du milieu de l'année prochaine, la pression sur les prix devrait alors nettement s'atténuer, de sorte que le taux d'inflation devrait à nouveau être inférieur à 2% fin 2023. La Banque nationale suisse (BNS) continuera à relever son taux directeur au cours des prochains mois et visera un niveau de 1% vers la fin de l’année. A la fin de l'année 2023, la SNB commencera petit à petit à baisser les taux directeurs.

Les pertes de pouvoir d'achat peuvent être compensées par des salaires nominaux plus élevés

L'une des conséquences de l'inflation élevée est que la Suisse se trouve cet automne dans une période de négociations salariales intense. L'année dernière, les salariés n'ont pas intégré les hausses de prix de cette année dans leurs revendications salariales. C'est pourquoi la hausse des prix à la consommation a réduit le pouvoir d'achat des salaires cette année. Selon les prévisions actuelles du KOF, les pertes de pouvoir d'achat subies cette année devraient être compensées l'année prochaine par des salaires nominaux plus élevés. Malgré le renchérissement plus élevé que prévu, les salaires réels ne reculeront pas en 2022 et 2023. Concrètement, le KOF prévoit que les salaires selon l'indice suisse des salaires (SLI), augmenteront nettement en termes nominaux cette année et l'année prochaine. Le KOF table dans ses prévisions sur 2,1% cette année et 2,7% l'année prochaine. Après déduction des impôts annuels attendus, il n'en résulte toutefois guère de gains salariaux réels.

 

Scénarios négatifs

Pour tenir compte de l'incertitude accrue en matière d'approvisionnement énergétique, le KOF présente deux scénarios négatifs.

Scénario négatif 1 :

Le premier scénario négatif repose sur l'hypothèse d'une interruption totale des livraisons de gaz et de pétrole de la Russie vers l'Union européenne à partir d'octobre 2022. Dans ce cas, seuls 25% des importations de gaz en provenance de Russie peuvent être compensés par des livraisons de gaz en provenance d'autres pays ainsi que par la substitution et d'autres mesures d'économie au moyen de sources d'énergie alternatives. Cela représente environ 4% de la quantité d'énergie disponible dans l'Union européenne.

Dans ce scénario négatif, on assiste à une baisse sensible de la valeur ajoutée durant le semestre d'hiver. Grâce aux réserves de gaz déjà constituées, la pénurie de gaz se fait surtout sentir au début de la nouvelle année. Selon ce scénario, l'économie suisse devrait croître de 2,1% en 2022 en données corrigées des évènements sportifs, mais se contracter de 0,4% en 2023. Par rapport au scénario de base, la croissance diminue ainsi de 1,4 point de pourcentage en 2023.

Scénario négatif 2 :

Dans le deuxième scénario négatif, toutes les hypothèses du scénario négatif 1 sont prises en compte, ainsi que l'hypothèse selon laquelle la production d'électricité des centrales nucléaires françaises se maintient jusqu'au début de 2023 au niveau de l'été 2022. La Suisse fait face à la pénurie d'électricité en France par des mesures d'économie ou des restrictions de consommation, de sorte que cela n'aura pas d'effets fortement négatifs sur la production. Néanmoins, les prix de l'énergie continuent d'augmenter sensiblement, ce qui continue de peser sur la production dans les secteurs à forte consommation d'énergie et donne une nouvelle impulsion à l'inflation. De plus, la situation économique se détériore dans les pays voisins et la plus grande incertitude réduit les investissements. Le produit intérieur brut recule encore de 0,8 point de pourcentage en Europe. En 2023, le PIB suisse diminue donc de 1% - cela correspond à un recul de 2 points de pourcentage par rapport au scénario de base.

Le scénario négatif du KOF ne couvre pas non plus tous les risques de baisse possibles. Il se concentre sur une pénurie d'énergie éventuelle. Un autre risque concerne l’évolution du COVID-19, en particulier en Chine, qui pourrait entraîner de nouvelles perturbations notables des chaînes d'approvisionnement mondiales.

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